L’actuel Premier ministre de l’Espagne, un socialiste, s’appelle Pedro Sánchez. La presse de toutes les nuances politiques s’est étonnée de sa volonté de s’accrocher à son poste plutôt que de démissionner ou de hâter les élections générales… Mais ces dernières s’annoncent pour bientôt, en 2023.

Fait amusant, le romancier carliste José María de Pereda avait déjà mis en scène, en plein XIXe siècle, un personnage répondant au nom de Pedro Sánchez. Et ce personnage-là s’est lancé dans le journalisme puis dans la politique par pur opportunisme, pour gagner de l’argent. Ce ne fut donc que par hasard qu’il arriva dans les rangs révolutionnaires et de gauche, avant de remarquer, le temps passant, qu’il ne faisait pas avancer la cause qu’il fallait…

Le Pedro Sánchez de José María de Pereda est une belle satyre de l’opportunisme, du monde des partis politiques et du parlementarisme. À lire sans attendre !

« — Que pensez-vous du señor don Augusto Valenzuela ?
— Je le tiens, me répondit-il à l’instant, pour un grand fripon.
— À la lettre ? répliquai-je.
— À la lettre, insista-t-il.
— Bien entendu, ajoutai-je sans la moindre intention de justifier le Manchois, vous voulez parler de l’homme d’État, du politique, mais non pas du…
— Quel homme d’État ? quel politique ? interrompit Matica, avec sa franchise habituelle. Je parle de l’homme, et je n’admets pas ces distinctions inventées par nos rhéteurs à la mode pour légitimer ce trop heureux métier qui consiste à vivre aux dépens du pays. Celui qui commet une friponnerie politique est un fripon comme tous les autres ; quand on n’est pas honnête dans sa vie publique, on ne peut pas l’être davantage dans sa vie privée. Est-ce que l’honneur est une statue à deux faces, ou un meuble à plusieurs usages ? Mais même en admettant cette bizarre distinction comme une excuse valable pour tous les crimes officiels, je maintiens le qualificatif en ce qui concerne l’important Manchois dont nous parlons. Le señor de Valenzuela est un monsieur qui, si le code civil était appliqué en Espagne à tous les Espagnols également, traînerait depuis plusieurs années trente livres de chaîne dans un bagne, avec beaucoup d’autres personnages qui comme lui roulent carrosse aux dépens de l’État. »