Avec L’Infante, Louis Betrand atteint les sommets de l’art du roman historique. L’intrigue qu’il présente lui tient à cœur. Il s’inspire des faits véridiques d’une conjuration espagnole à Villefranche-de-Conflent au XVIIe siècle, se frayant un chemin entre les différentes versions conservées par les mémoires populaires au sujet de la jeune Ines de Llar et de sa famille…
Un roman puissant, où Louis Bertrand présente à ses lecteurs émerveillés une région dont il est tombé amoureux : la Catalogne française. C’est spécialement au Conflent qu’il donne la plus grande partie de ses scènes, mais Perpignan et la Castille ne sont pas en reste.
Le titre du livre ne doit pas tromper : L’Infante, c’est le surnom donné à la jeune Ines de Llar. Pourquoi ? Pour ses cheveux blonds et sa peau claire, associés à une rare beauté, qui la font ressembler à une damoiselle de la maison d’Autriche plutôt qu’à la fille de hobereaux de la montagne… Mais c’est aussi sa morgue toute castillane, son air altier, sa fierté, et l’habit avec garde-infant qu’elle revêt lors d’un bal mémorable…
Un récit puissant, qui ne laissera personne indifférent. Le devoir et Dieu premier servi avant l’amour humain…
« − Savez-vous à qui je pense, en cette minute ?… Je pense à Inès de Llar, à cette jeune fille de Villefranche qui, par amour pour un officier français, trahit, dit-on, son père, sa mère et tous les siens, avec leurs amis et leurs proches, qui avaient formé le complot de livrer la place aux Espagnols. Voilà vingt ans, moi aussi, que je vins à Villefranche pour la première fois. Trois lignes du guide me révélèrent l’existence de cette jeune passionnée. Je n’en sais pas plus, sinon que ce terrible drame d’amour se passa en 1674, au lendemain de l’annexion du Roussillon et de la Cerdagne à la France. Mais, depuis ce temps-là, chaque fois que je reviens ici, je rêve de cette petite patricienne, de cette fille de hobereaux tout gonflés de morgue castillane, et je me dis qu’elle dut être bien affamée d’amour pour commettre un pareil crime, pour imprimer une pareille tache sur le blason familial. Elle m’inspire une sympathie et une pitié profondes. Quand j’entre à Villefranche, c’est cette pâle figure aux grands yeux tristes que j’aperçois toujours, derrière les meurtrières des vieux remparts ou les fenêtres grillées des vieux logis…
» − Comme vous, dit l’Évêque, – et depuis plus longtemps que vous, – j’aime Inès de Llar. Je lui pardonne. Elle a dû tant souffrir !…
» Et, après avoir réfléchi un instant, il prononça, avec la plus pressante persuasion :
» − Il faut que vous racontiez cette histoire !…
» Comment cela se fit-il ? Instantanément, je fus convaincu qu’il le fallait en effet. »
− Conversation avec Monseigneur Jules du Pont de Carsalade, évêque d’Elne, rapportée par Louis Bertrand, de l’Académie française, dans le « Prologue » de son ouvrage.