Description
« Ami lecteur, lecteur, si tu connais la vie et les misères humaines, si tu es courageux, si tu aimes la vérité, tout amère qu’elle soit, ouvre sans crainte les pages de ce livre : tu n’y trouveras rien que tu ignores, qui t’étonne ni qui t’offense. si tu es d’âme pieuse et timide, si tu n’es pas sorti de ces limbes de l’entendement où nous enferme le manque d’expérience plutôt que l’innocence du cœur, si la vérité te scandalise, parce qu’elle est nue, et blesse ton amour-propre, parce qu’elle est rude, arrête-toi —ou du moins, n’avance pas sans écouter ce que je dois t’apprendre. […]
» Que si enfin, après m’avoir concédé raison sur tous ces points, tu juges cette histoire singulièrement profane et malséante à la gravité du journal qui l’a publiée (Le Messager du Sacré-Cœur de Jésus de Bilbao), considère que ses abonnés ne sont pas tous, ainsi que toi sans doute, pieux et uniquement occupés de lectures spirituelles. parmi eux figurent des femmes du monde à côté d’abbesses vénérables, des oisifs et de joyeux jeunes gens avec des congréganistes de Saint-Louis. il faut que chacun trouve des aliments substantiels et agréables. un palais blasé n’accepte de mets salutaires que s’ils sont convenablement épicés. À combien d’affamés doit-on faire
absorber en petites doses, par surprise et, pour ainsi dire, relevée d’une sauce honnêtement profane, la divine nourriture du Christ ! Au-dessus de la charité qui consiste en aumônes, je place celle qui comprend et réconforte les défaillances humaines. C’est elle qui m’a fait prendre la plume, dût-on me reprocher, ainsi que je l’ai déjà entendu, d’abaisser le caractère ecclésiastique à des frivolités. Comme si, pour la charité, descendre était se ravaler !…
absorber en petites doses, par surprise et, pour ainsi dire, relevée d’une sauce honnêtement profane, la divine nourriture du Christ ! Au-dessus de la charité qui consiste en aumônes, je place celle qui comprend et réconforte les défaillances humaines. C’est elle qui m’a fait prendre la plume, dût-on me reprocher, ainsi que je l’ai déjà entendu, d’abaisser le caractère ecclésiastique à des frivolités. Comme si, pour la charité, descendre était se ravaler !…
» Et maintenant, ami lecteur, demeure en paix. Libre à toi, s’il te plaît, d’ouvrir ces pages ou de te dérober. Mais je crains que tu ne brûles de les lire et que tu ne les dévores lettre à lettre. Je crains — si, comme je le désire, mes arguments ne t’ont point convaincu — d’avoir excité malgré moi ta curiosité. Que Dieu soit avec toi et qu’il te bénisse. Pour moi, je retourne à ma solitude. » R.P. Luis Coloma, s.j.
Plaisir de lire, n° 204, septembre 2023 –
Ces « bagatelles » hispaniques illustrées par des scènes épiques pleines de panache mêlent histoire et anecdotes pleines de rebondissements. Le Père Coloma prévient le lecteur dans une préface
claire et précise qu’il a écrit ce roman afin que « chacun y trouve des aliments substantiels et agréables » et qu’après les avoir prémunis contre l’erreur, il voudrait leur inspirer désir et force de se corriger ; tout ceci dans un style léger et agréable nullement alourdi par le but recherché.
Pour qui ce livre ? Tous ceux qui cherchent le dépaysement apprécieront cette page de littérature espagnole emplie d’épopées et d’aventure. Le lecteur pourra se contenter d’une lecture au premier degré de ce roman sympathique, mais une lecture plus approfondie lui permettra d’en tirer la substantifique moelle. (Éditions du Drapeau blanc, 324 p., 2023, 20 €)